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Oct
Chems-Eddine Hafiz à One TV : « Ceux qui me qualifient d’ambassadeur d’Algérie cherchent à minimiser mon rôle de recteur. »
Dans une interview accordée lundi à la chaîne One TV, Chems-Eddine Hafiz, recteur de la Grande Mosquée de Paris, a répondu aux questions de Khaled Drareni et levé le voile sur les dessous d’une relation complexe entre le président algérien Abdelmadjid Tebboune et son homologue français Emmanuel Macron. Témoin direct de plusieurs échanges avec le chef de l’État algérien, Hafiz a livré un témoignage rare sur les raisons profondes ayant mené à la détérioration des relations diplomatiques entre Alger et Paris.
Dès le début de son mandat, le président Tebboune avait exprimé une volonté claire de nouer un lien « simple et transparent » avec la France. Selon le recteur, Tebboune nourrissait de grands espoirs dans cette relation, s’appuyant sur des déclarations chaleureuses d’Emmanuel Macron, qui allait jusqu’à l’appeler affectueusement « notre grand frère Abdelmadjid Tebboune ». Hafiz évoque même une scène touchante où Macron lui aurait confié en privé : « Je te regarde et je pense à mon frère Abdelmadjid Tebboune. »
Cette proximité, perçue comme sincère, avait laissé entrevoir une possible relance des relations franco-algériennes, longtemps entachées par l’Histoire et les malentendus diplomatiques. Mais cet élan d’optimisme n’a pas résisté à l’épreuve des faits
D’après Chems-Eddine Hafiz, la fracture ne saurait se réduire à une seule déclaration, bien que la reconnaissance par Emmanuel Macron, en juillet 2024, de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental ait constitué « le point de non-retour ». En réalité, la rupture résulte d’un enchaînement de promesses non tenues de la part de Paris, ce qui aurait profondément agacé Abdelmadjid Tebboune, le poussant à conclure qu’il ne pouvait plus accorder sa confiance à Macron.
Ce sentiment de trahison a fini par enterrer une relation déjà fragilisée, transformant ce qui aurait pu être un malentendu diplomatique en une véritable crise d’État entre les deux capitales.
Au-delà des enjeux politiques, Chems-Eddine Hafiz attire l’attention sur les conséquences humaines de cette crise. Il déplore que les Algériens résidant en France subissent aujourd’hui les contrecoups de cette rupture : montée des discours racistes, tensions sociales accrues, et sentiment d’abandon au sein d’une communauté prise au piège d’une querelle d’États.
Le recteur critique également la posture de fermeté adoptée par Emmanuel Macron début août, estimant que ces déclarations n’ont fait qu’« envenimer la situation » sans apporter de solution concrète.
Fidèle à sa mission de paix et de rassemblement, Chems-Eddine Hafiz plaide pour une désescalade urgente. Il rappelle qu’auparavant, avec le cardinal Jean-Paul Vesco, archevêque d’Alger, il avait cosigné un appel solennel à préserver la fraternité entre les peuples algérien et français. Un message toujours d’actualité face à une tension diplomatique persistante.