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Juin

Des chercheurs, artistes et universitaires algériens lancent une pétition contre l’appropriation du Caftan par le Maroc

Un vent de contestation souffle au sein des milieux culturels et académiques algériens après le dépôt par le Maroc d’un dossier auprès de l’UNESCO pour inscrire le Caftan sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité, en tant qu’élément exclusivement marocain. Une initiative perçue par de nombreuses voix algériennes comme une tentative d’appropriation culturelle.

Chercheurs, universitaires, artistes, artisanes et membres d’associations œuvrant à la sauvegarde du patrimoine algérien dénoncent dans un appel à signature une volonté récurrente du Maroc de s’attribuer des éléments d’un héritage partagé entre plusieurs peuples de la région. Ils rappellent que le Caftan n’est pas un monopole culturel, mais un vêtement aux racines historiques multiples, présent dans plusieurs régions d’Algérie, notamment à Tlemcen.

L’Algérie avait déjà obtenu, en 2012, l’inscription par l’UNESCO des « rites et savoir-faire associés à la tradition du costume féminin nuptial de Tlemcen » sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Ce dossier comprend l’ensemble des vêtements traditionnels et parures portés lors des cérémonies nuptiales, parmi lesquels figure le Caftan, désigné localement sous le nom de « Lebset El Arftan », selon la prononciation arabo-andalouse typique de la région de Tlemcen.

Une reconnaissance élargie en 2024

Plus récemment, le 4 décembre 2024, l’Algérie a obtenu l’inscription d’un second dossier à l’occasion de la 19e session du Comité intergouvernemental pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, tenue à Asunción, au Paraguay. Ce dossier porte sur le « Costume féminin de cérémonie dans le Grand Est algérien : savoirs et savoir-faire liés à la confection et à la création de bijoux, Gandoura, Melhefa, Elquat, Elquayet et Caftan ».

Il met en lumière la diversité et la richesse du patrimoine vestimentaire féminin algérien, notamment à travers des pièces emblématiques telles que la Gandoura, le Caftan ou encore la Melhefa, accompagnées de bijoux traditionnels. Ce patrimoine vivant s’appuie sur des savoir-faire artisanaux ancestraux, transmis de génération en génération.

Pour les signataires de l’appel, il est essentiel de préserver une lecture partagée et respectueuse de l’histoire culturelle de la région. Le Caftan ne saurait être réduit à une seule identité nationale tant ses formes, ses usages et ses significations varient d’un territoire à l’autre, tout en restant le reflet d’un héritage commun à tout le Maghreb.

Cette contestation vise aussi à rappeler les principes fondateurs de la Convention de l’UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, qui valorise la diversité culturelle, le dialogue interculturel et la coopération entre les peuples.

Vers une mobilisation plus large ?

L’appel lancé par des personnalités du monde académique, artistique et associatif en Algérie souligne l’importance d’une reconnaissance équitable du patrimoine partagé, sans tentatives d’appropriation ou d’exclusivité. Il invite les institutions internationales à considérer la complexité historique et culturelle des traditions du Maghreb, au lieu de les cloisonner selon des frontières modernes souvent réductrices.

La mobilisation autour de cet enjeu patrimonial pourrait s’amplifier dans les semaines à venir, à mesure que la société civile et les experts du patrimoine appellent à une vigilance accrue face à ce qu’ils estiment être des dérives mémorielles à caractère politique.

Voici le lien de la pétition.

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