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Daho Ould Kablia : “Boussouf, Boumediene, Medeghri, Bouteflika et Abane, cinq destins liés à l’histoire de l’Algérie”

Dans une longue interview accordée à l’émission One to One de Khaled Drareni sur One TV, l’ancien ministre de l’Intérieur et président de l’Association des anciens du MALG, Daho Ould Kablia, est revenu sur plusieurs pages marquantes de l’histoire contemporaine de l’Algérie, évoquant notamment le rôle déterminant du MALG, la personnalité d’Abdelhafid Boussouf, et les tensions post-indépendance qui ont façonné le destin politique du pays.

Daho Ould Kablia a d’abord rappelé la signification du 1er Novembre 1954, qu’il considère comme “la consécration de l’idée de résistance et d’aspiration à la liberté”. Il a ensuite salué la mémoire de Messali Hadj, “le véritable père du nationalisme algérien, malgré ses erreurs politiques”.

L’ancien ministre a particulièrement insisté sur la figure d’Abdelhafid Boussouf, qu’il décrit comme “un militant qui a transformé l’idée d’indépendance en action de libération”. Selon lui, “lever le tabou sur le MALG, c’était rendre justice à Abdelhafid Boussouf, moteur de la Révolution algérienne”.

Ould Kablia est revenu sur la période de l’après-indépendance, marquée par des luttes de pouvoir internes : “Les querelles post-indépendance ont enterré l’esprit démocratique du Gouvernement provisoire de la République algérienne et ouvert la voie au parti unique.” C’est dans ce contexte, ajoute-t-il, que Boussouf “s’est retiré avant l’indépendance, refusant la dérive vers le pouvoir personnel et le parti unique”, préférant “le retrait plutôt que l’affrontement”.

Le rôle de Houari Boumediene a également été abordé. Daho Ould Kablia rappelle que “Boumediene était à l’origine une création de Boussouf, qui l’a accueilli après le refus de Boudiaf et en a fait son bras droit”. Il précise toutefois que le président “ne détestait pas les membres du MALG, il s’en méfiait et les craignait malgré son amitié avec eux”.

Interrogé sur les relations entre Boussouf et les dirigeants successifs, Ould Kablia confie que ce dernier “n’était pas totalement satisfait des orientations de Chadli”, mais qu’il continuait à rencontrer ses anciens compagnons “sans que personne ne me le reproche”.

Sur le plan institutionnel, il regrette que “la mémoire nationale envers le Gouvernement provisoire et le MALG soit aujourd’hui négligée malgré leur rôle historique dans l’indépendance”.

Concernant la mort d’Abane Ramdane, Daho Ould Kablia reconnaît que “la manière dont il est mort n’était pas honnête, et son écartement était inévitable à cause de la lutte pour le pouvoir”. Il ajoute qu’Abane “voulait un pouvoir politique centralisé sous sa domination, ce qui a provoqué la rupture avec Krim Belkacem et Boussouf”.

L’ancien ministre est aussi revenu sur la marginalisation du MALG après 1962 : “La reconnaissance des anciens du MALG n’est réellement venue qu’après la mort de Boumediene. Ni Ben Bella ni Boumediene ne leur avaient accordé de place, avant que Chadli Bendjedid ne les réhabilite en les nommant walis et ministres.”

Selon lui, le MALG n’a jamais eu d’ambition partisane : “Le MALG n’a jamais été une force politique mais un organe d’exécution clandestin et neutre. Ceux qui ont pris parti pour Ben Bella ou Boumediene en ont été moralement exclus.”

Enfin, il évoque le drame d’Ahmed Medeghri, “qui s’est suicidé après une grave crise psychologique. Il était en conflit avec Boumediene, comme la plupart de ceux qui l’avaient soutenu au départ, à l’exception de Bouteflika qui jouait sur tous les tableaux”.

Daho Ould Kablia conclut en soulignant que Boumediene, à la fin de son règne, “voulait réformer, mais il est devenu prisonnier de sa popularité, craignant de la perdre en changeant de cap”.

À travers cet entretien dense et sans détour, l’ancien ministre offre un éclairage rare sur les zones d’ombre de la Révolution et de ses héritages, plaidant pour une relecture apaisée et lucide de l’histoire du MALG et de ses hommes.

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